Le Trésor du breton écrit Teñzor ar brezhoneg skrivet
Ce blog s'inscrit en complément de la Chronique Brezhoneg : trésor du breton écrit publiée dans Ouest-France dimanche. Vous y trouverez les textes intégrals et leurs traductions ainsi que des éléments de bibliographie et des liens internet pour en savoir plus. Amzer ar brezhoneg skrivet a ya eus ar bloaz 800 betek vremañ. Kavout a reoc'h amañ ar pennadoù en o hed hag o zroidigezh ha war an dro un tamm levrlennadurezh hag al liammoù internet da vont pelloc'h ganti ma peus c'hoant.

1916 : L’évasion incroyable de Michel Lec’hvien, cultivateur de Ploubazlanec

La grande guerre fut un tel traumatisme pour ceux qui l’on vécue qu’il a fallu plusieurs années pour qu’ils témoignent. Michel Lec’hvien, cultivateur de Ploubazlanec près de Paimpol, publie ainsi dix ans après, le récit de son évasion d’Allemagne : War hent ar gêr (Sur le chemin de la maison). Ce texte récemment réédité aux éditions « A l’ombre des mots » est particulièrement emblématique de ces héros ordinaires qui ont fait leur devoir.

A peine mobilisé, Michel Lec’hvien, est envoyé au front : brigadier d’am rejimant, an dried artilhiri war droad, ha d’ar red kerkent war dachenn an emgann. e kêr Maubeuge. Stourm a rejomp eno, eus ar gwashañ, Met penaos harp ouzh enebourien ken niverus ? (Brigadier au troisième régiment d’artillerie, nous fûmes menés tout de suite au combat, à Maubeuge. On se défendit comme des lions, mais comment faire contre des ennemis si nombreux ?)

Fait prisonnier, il est interné au nord de l’Allemagne dans un camp de travail : toullañ henchoù nevez, difraostañ douaroù kozh, didourañ doaroù gleb. E-keit-se ur soñj a oa pell zo o troiata em fenn : mont kuit hep goût d’ar Boched. (faire des routes, défricher, assécher des terres humides, je n’avais qu’une idée en tête, échapper aux Boches).

Le 3 avril 1916 c’est le grand jour : Peb a lamm er-maez dre ar prenestr, c’hwec’h troatad uhelder, a sko war ar prad, ha setu an tri breton evit mat war hent ar gêr.

(On saute par la fenêtre, 6 pieds plus bas dans un pré, et voilà nos trois Bretons en route pour la maison).

L’idée est de rejoindre les Pays-Bas en progressant de nuit : Pa veze hent reizh dirakomp ec’h aemp d’ar red, pa gavemp  brouskoajoù e kerzhemp gorrekoc’h ha didrouz, gant aon dihuniñ tud pe chas. An henchoù, bremañ n’o zreuzemp nemet a-ruz war hon c’hrabanoù(Quand le chemin était dégagé nous courrions, quand nous trouvions un bosquet nous marchions sans bruit de peur de réveiller des gens ou des chiens. Les routes, nous les traversions en rampant).

L’accueil des Hollandais fut fantastique : Degemeret e voemp e-giz breudeur. Bezañ hon doa kafe, bara ha butun, ar pezh a garemp (Nous fûmes reçus comme des frères, avec du café, du pain, du tabac, tout ce que nous voulions).

Trois jours après, ils étaient en route pour  la France. Michel Lec’hvien retourna au front,

obtint quatre médailles et fut démobilisé en Août 1919.

Pennad orin / Texte original

Pa oa an deiz o c'houlaouiñ, e tigouezas dimp tremen e-kichen ur gêriadennig ha na oa ket an tiez enni heñvel ken ouzh tiez alaman. Pa voe deuet sklaer a-walc'h an deiz, unan ac'hanomp a bignas war ur wezenn 'vit gouzout ha pell e oa c'hoazh ar gêr hollandek Wintersuysk ; setu ma welas o parañ dirakañ, war bouez un hanyer lev, gouleier e-leizh. E oamp erru !

O Nag e voemp diboaniet ! Laouen bremañ ha sart, ni a valee skañv ! Hepdale e vijemp digollet eus ar boan gouzañvet ; an diskuizh a deuje goude an devezhioù ankenius ; hepdale, vijemp er gêr !
War dro 6 eur hanter diouzh ar beure, - orolaj un tour a verke an eur-se, er gwener 7 a viz ebrel 1916 e tigouezemp e kêr Wintersuysk.

Troidigezh / Traduction

Quand le jour pointait, il nous arriva de passer auprès d'un village où les maisons ne ressemblaient plus à celle des Allemands. Lorsqu'il fit plus clair, l'un de nous monta sur un arbre pour savoir si la ville de Wintersuysk était encore loin et voilà qu'il vit briller devant lui, à environ une demi lieue, des lumières en grand nombre. Nous étions arrivés !.

O combien nous étions soulagés. Joyeux maintenant et sereins, nous marchions légers ! Sans délai, nous serions dédommagés des peines endurées, le repos viendrait après les journées douloureuses, nous serions sans retard à la maison !

Vers six heures et demi du matin - l'horloge d'une tour marquait cette heure- le vendredi 7 avril 1916, nous arrivames en ville de Wintersuysk.

Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin

Brezhoneg :

Lec'hvien (Michel), War hent ar gêr, Emb. Breiz, 1929.

Bilingue Français/breton :

Lagadec (Yann) - Le Goff (Hervé), War hent ar gêr - Sur la route de la maison, la Grande Guerre banale et exceptionnelle de Michel Lec'hvien, 280p., Ed. A l'ombre des mots, Pabu, 2017. 

Français : 

Le Gall (Erwan), Qui est l'auteur d'un témoignage combattant, Michel Lec'hvien et War hent ar gêr, En Envor, http://enenvor.fr/eeo_actu/livres/qui_est_l_auteur_d_un_temoignage_combattant_michel_lec_hvien_et_war_hent_ar_ger.html

Poisson (H), L'abbé Pierre-Marie Lec'hvien, 1959, 112p
http://bibliotheque.idbe-bzh.org/data/cle_53/LAbbA_Pierre_Marie_Lechvien_.pdf