Le Trésor du breton écrit Teñzor ar brezhoneg skrivet
Ce blog s'inscrit en complément de la Chronique Brezhoneg : trésor du breton écrit publiée dans Ouest-France dimanche. Vous y trouverez les textes intégrals et leurs traductions ainsi que des éléments de bibliographie et des liens internet pour en savoir plus. Amzer ar brezhoneg skrivet a ya eus ar bloaz 800 betek vremañ. Kavout a reoc'h amañ ar pennadoù en o hed hag o zroidigezh ha war an dro un tamm levrlennadurezh hag al liammoù internet da vont pelloc'h ganti ma peus c'hoant.

1848 : Paul Lebreton à la recherche des Martiens, imagine un voyage dans la lune

17 ans avant Jules Vernes le Brestois Paul Lebreton a imaginé un voyage vers la lune. Dans un ouvrage d’astronomie très sérieux, Studi war an astroù (étude sur les astres), il décrit la planète Mars : « Ment Meurzh a zo pemp gwech bihanoc’h evit an douar, e sklerijenn a zo ruz. Triwec’h mil lev bep eur a ra. An tommder a resever eno diouzh an heol a zo pemp gwech nebeutoc’h evit an hini a resevomp » (Mars est 5 fois plus petite que la terre et elle émet une lumière rouge. Elle avance à 18000 lieues chaque heure. Elle reçoit cinq fois moins de chaleur que nous).
Son livre écrit dans un excellent breton nous donne tout le vocabulaire de l’astronomie : heol, (soleil), loar (lune), steredenn al labourer (Vénus), hent Sant-Jakez pe an hent gwenn (La voie lactée), stered lostek (comète)…
A la fin de son livre il pose les questions qui taraudent les scientifiques de l’époque : Hag-eñ eo posubl mont d’al Loar pe d’ur blanedenn-all bennak ? (Est-il possible d’aller sur la lune ou sur une autre planète ? Il énumère les difficultés : N’eus ket aer uheloc’h da bemp lev war’ugent a-us deomp ! (Il n’y a pas d’air 25 lieues au-dessus de nous !), dre be lec’h en em dirijañ evit kaout al Loar dre ma vale atav ? (Par quel chemin trouver la lune qui est toujours en mouvement ?), Ur wech tapet ar c’houch a « attraction », n’eo ket pignat e rafe ken met kouezhañ el loar ken buan evel ma sorti ur vouled diouzh ur c’hanol ! (Une fois arrivé dans la pesanteur lunaire, ce n’est pas monter mais tomber à la vitesse d’un boulet de canon qu’il fera !). Avec beaucoup d’humour il conclut : Douetiñ a ran en em amuzfe hon beajour, goude al lamm-se da eksaminañ habitanted e Vro Nevez, hag an traoù kurius a c’hallfe bezañ e-barzh. ( Je subodore que notre voyageur, après cette chute, s’amusera beaucoup à examiner les habitants de son nouveau pays et des choses curieuses qu’il pourra voir autour de lui !).
Il poursuit son raisonnement en se demandant s’il existe des Martiens ? Pour Paul Lebreton c’est clair : N’em eus douetañs ebet ez eus habitanted war al loar, er blanedennoù all ha memes en heol … Mes piv a c’hello lavaret hag int a vale war daou droad pe war bevar, pe int a zo graet eveldomp-ni ha diouzh hor ment ? ( Je n’ai aucun doute, qu’il y a des habitants sur la lune, sur les autres planètes et même le soleil…mais qui pourra nous dire si ce sont des bipèdes ou des quadrupèdes, s’ils sont fait comme nous et à notre taille). Sa théorie c’est que certaines espèces s’adaptent aux conditions extrêmes ce qui est vérifié chaque jour par les scientifiques.

Cet écrit étonnant précède de 30 ans la vogue des Martiens lancée par Schiparelli en 1877.
Le mot Meurzhiad (Martien) ne fera son entrée dans les dictionnaires bretons qu’en 1931.

Pennad orin / Texte original

Hag-eñ zo habitanted er blanedennoù-all hag en Heol

(...)

War sujed habitanted an Heol, marteze e c’hallfe meur a hini douetiñ abalamour d’an tommder a gle bezañ en astr-se. Respont a ran penaos eo aezetoc’h kaout habitanted d’an Heol evit lakaat ar gedon da vevañ e foñs ar mor hag ar pesked er waremmoù. An habitanted a zo graet diouzh ar Vro e pehini e tleont bezañ…

Ne finisfen ket ma fellfe din heñvel diouzh ar voiennoù a ro ar brovidañs da beb tra krouet da vevañ er plas a zo merket dezhañ ; Arabat eo deomp eta kaout imposubl en defe Doue, gouzet ober habitanted evit an heol.

Bez ez eus eta loened e kement tra krouet ‘zo, hag e-touesk al loened-se ez eus un espes hag a surpas holl ar-re all e galloud, er spered hag er raezon : an espes-se eo an den, pehini re alies, siwazh, a ra implij fall deus an donezonoù prisius-se.

Studi war an astroù (p.34).

Troidigezh / Traduction

Y a t'il des habitants dans les autres planètes et dans le soleil ?

(...)

Au sujet des habitants du soleil, sans doute que certains doutent à cause de la chaleur qui doit règner dans cet astre. Je réponds qu'il est plus facile de trouver des habitants dans le soleil que des lièvres au fond des mers et que des poissons dans les garennes. Les habitants sont faits pour les pays qu'ils habitent...

Je ne finirai pas sans parler des moyens que la providence donne à tout être créé pour qu'il vive à la place qui lui est assigné. Nous ne devons pas trouver impossible que Dieu n'ait pas su créer des habitants dans le soleil.

Il y a des bêtes dans chaque chose créée, et parmi ceux ci il y a une espèce qui surpasse tous les autres, en puissance, en esprit et en raison, c'est l'Homme, qui hélas utilise souvent mal ces biens précieux.

(Etude sur les astres, p. 34)

Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin

Lebreton (Paul), Studi war an astrou, Brest, 1848
Caer (Jean-François), Daoust hag ar stered a zo poblet, in Feiz ha Breiz, 1907, miz Here, pp 227-230
Nelly Blanchard, Studi war an astrou : des lumieres dans l'ombre, in La Bretagne Linguistique, 2019, lenn en linenn

Wikipedia Brezhoneg : Meurzh (planedenn)  

Bruno Mauguin ha Bénédicte Saulier-Le Dréan, Koskoriad an Heol,  (Egorenn ar skiantoù), treiñ gant an Ofis ar Brezhoneg, Roazhon, 2006, Éditions Apogée,
Radio Kerne : Eizh abadenn war Blanedenn Veurzh, gant Dominique Merrien.