Le Trésor du breton écrit Teñzor ar brezhoneg skrivet
Ce blog s'inscrit en complément de la Chronique Brezhoneg : trésor du breton écrit publiée dans Ouest-France dimanche. Vous y trouverez les textes intégrals et leurs traductions ainsi que des éléments de bibliographie et des liens internet pour en savoir plus. Amzer ar brezhoneg skrivet a ya eus ar bloaz 800 betek vremañ. Kavout a reoc'h amañ ar pennadoù en o hed hag o zroidigezh ha war an dro un tamm levrlennadurezh hag al liammoù internet da vont pelloc'h ganti ma peus c'hoant.

1834 : Quand le breton sert à populariser la vaccination : Tro-Breizh Simon a Vontroulez

Le Breton a la côte sous Louis-Philippe. Ainsi on voit le ministre de l’éducation Montalivet prôner l’enseignement bilingue en Bretagne, et son successeur Guizot financer la diffusion de l’ouvrage Simon a Vontroulez (Simon de Morlaix) dans les écoles. Dans son Tro-Breizh (Tour de Bretagne), ce personnage répand les idées d’entente mutuelle et des conseils de bonne conduite : c’est ainsi qu’il prend fait et cause pour la vaccination contre la variole (ar vrec’h). Vaccination se dit alors lakaat ar vrec’h (inoculer la variole) ou brec’hidigezh (variolisation).

De passage à Quimperlé, Simon rencontre une petite fille défigurée par la petite vérole, il s’en prend à la mère : Bez hoc’h eus resevet instruktionoù brezhonek e pehini e verked deoc’h ar madoù burzhudus a opere ar vaksin, hag an dañjer bras ‘zo da viret na vez vaksinet ar vugale (Vous avez reçu des instructions en breton qui vous montraient les bienfaits miraculeux du vaccin et le grand danger de ne pas vacciner les enfants !)

Ce texte nous apprend que l’idée de la vaccination a été soufflée à Jenner par le Français Rabaud. Les vaccinations contre la variole ont commencé en France dès 1800. Convaincu de son efficacité, Napoléon a fait vacciner ses troupes et son fils.  Le gouvernement a reconnu les bienfaits de la deuxième vaccination en 1830. Madelezh ar gouarnamant he deus establiset burevioù evit vaksinañ, hag an nep a refus hen ober a zo koupabl en o enep o unan, a-enep ar gouarnamant, a-enep ar bed holl. (Les largesses du gouvernement ont permis d’établir des centres de vaccination et celui qui refuse devient coupable envers lui-même, envers le gouvernement, envers l’humanité toute entière.)
Simon enfonce le clou dans une harangue publique : Bez ez eus tud a lavar « Gwelet a rimp ». An dud-se zo foll. Gwelet a ran en ho touez hag a hej o fenn gant douetañs ouzh efed ar vaksin. Muioc’h a gonfiañs ho pefe marteze en drogach ur charlatan bennak a rafe goap ac’hanoc’h ? (Certains disent « on verra », ces gens sont fous. Je vois parmi vous des gens qui doutent de l’effet du vaccin ; auriez-vous plus confiance dans la drogue d’un charlatan quelconque qui se moquerait de vous ?).

La dernière épidémie de variole en France fit 20 morts à Vannes en 1954 alors que la vaccination était obligatoire depuis 1902. La variole, le pire fléau qu’a connu l’humanité, a été éradiquée dans les années 1970.

Pennad orin / Texte original

Ar vrec'hidigezh

« E bro Scoçz e voa ur medecin hanvel Jenner, pehini en devoa evessêt calz ar ravach eus ar vrec’h, hac a glasqe pell a voa ur voyen benac evit diminui ar fulor eus ar vrec’h maleurus. N’en devoa qet allet c’hoas disolo netra, pa ziguezas dezàn remercout ar messaerien dénved, hac er Scoçz e zeus calz, a drape avichou bulbuennou evel ar re a deu da deziou ar zaout. O interrogi a eure, hac e vouezas dioute penaus ar re o devoa bet ar bulbuennou-se, n’o devije james ar vrec’h.
Er memes amzer ur Gall hanvet Rabaud, habitant deus Montpellier, en devoa grêt ar memes observation, hac en devoa comzet eus a se da ur medecin Sauz, pehini a gontas an dra-se d’ar medecin Scoçz. Emàn ractal a eure experiançou, goude pere ec’h anavezas e voa fontet mad re an autrou Rabaud, hac e re e-unan. Neuze e reas anavezout an disolo-se, hac an oll vedecinet a assuras dre experiançou all an hini en devoa grêt an doctor Jenner.
Laqet so bet da gousqet, epad meur a zevez, ur buguel vaccinet gant ur buguel leun a vrec’h, hac ar c’hléved n’en deveus qet bet qemeret en hini vaccinet. Beza e zeus neuze tud hac a lavar penaus ar vaccin a ro clénvejou all. An dud sod a gred an dra-se ; mes faribolennou eo qementse : ampech a ra da gaout ar vrec’h, ha cetu eno tout. Ur vad qen bras eo, ma tlefe an oll gouzout hano Jenner ar Scoçzian, hac hini ar Gall Rabaud, evit o repeti hep cess gant anaoudeguez, e peb brô eus ar bed.

Simon a Vontroulez P.57 (Wikimammenn)

Troidigezh / Traduction

Découverte de la vaccination

En Écosse, il y avait un médecin connu appelé Edward Jenner qui avait remarqué les ravages de la variole et qui cherchait depuis longtemps à diminuer les effets de cette malheureuse variole. Il n'avait encore rien découvert quand il s'aperçut que les gardiens de moutons d'Ècosse étaient couverts de pustules semblable à celles qu'on trouve sur le pis des vaches. Il les interrogea et remarqua que ceux qui avaient ces pustules n'attrapaient jamais la variole.
Au même moment un français nommé Rabaud, habitant Montpellier, avait fait la même observation et il en avait parlé à un médecin anglais qui le répèta au médecin écossais. Celui-ci fit immédiatement des expériences pour vérifier que les observations de Rabaud étaient fondées ainsi que les siennes. Alors Jenner fit connaitre ses observations que purent vérifier d'autres médecins.
On fit dormir côte à côte deux enfants, l'un était vacciné et l'autre couvert de variole, et la maladie ne prit pas dans celui qui était vacciné. Il y eut alors d'autres gens pour affirmer que le vaccin transportait d'autres maladies. Les gens dérangés y croient, mais ce sont des fadaises, le vaccin empêche d'avoir la variole et c'est tout. C'est un si grand progrès que tout le monde devrait connaitre le nom de l'écossais Jenner et du français Rabaud, pour les faire connaitre partout dans le monde.

Simon de Morlaix (texte original disponible sur Wikimammenn)

Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin

Ledan (Alexandre), Simon a Vontroulez, Montroulez, 1834. (Lec'hienn Kan.bzh)
Jussieu (Laurent de), Simon de Nantua ou le marchand forain, 1821. (Site Gallica.fr).

Le Menn (Gwenole), Une "bibliothèque bleue" en langue bretonne, in Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest Année 1985 92-3 pp. 229-240

Goursolas (François), Une épidémie de variole en Bretagne 1954-1955, in Histoire des sciences médicales, vol. XXXVIII, no 1,‎ , p. 99-108

Tulleau (M), Boullé (S), Jenner, médecin écossais