Le Trésor du breton écrit Teñzor ar brezhoneg skrivet
Ce blog s'inscrit en complément de la Chronique Brezhoneg : trésor du breton écrit publiée dans Ouest-France dimanche. Vous y trouverez les textes intégrals et leurs traductions ainsi que des éléments de bibliographie et des liens internet pour en savoir plus. Amzer ar brezhoneg skrivet a ya eus ar bloaz 800 betek vremañ. Kavout a reoc'h amañ ar pennadoù en o hed hag o zroidigezh ha war an dro un tamm levrlennadurezh hag al liammoù internet da vont pelloc'h ganti ma peus c'hoant.

1948 : Renaissance de Pardon Speied, chanson paillarde mythique du répertoire breton

Popularisée mondialement par Alan Stivell, la chanson Pardon Speied faisait partie de la Suite sud-armoricaine qui fit un buzz à l’Olympia en 1972. Le sonneur Yann Meur a eu la bonne idée d’aller à la source de cette chanson énigmatique qui détonne dans le répertoire traditionnel. Au départ il y a une mélodie Pardon Koloreg (Le pardon de Collorec) : « Ba’ Pardon Koloreg me renkontras ma mestrez ha me yay d’he c’haoued ken koant ma oa hi ha da c’houlenn diganti ha dimezet e oa hi. (Au pardon de Collorec, je rencontrai ma bien aimée et j’allai la trouver tant elle était jolie pour lui demander si elle était mariée). La jeune fille lui fait croire qu’elle est riche mais une fois marié le galant doit déchanter Pa oan dimezet d’ar plac’h-se n’em boa gwelet netra nemet ur c’hozh podez, div skudell ha div loa, div vuoc’h kozh a oa eno … (Quand je fus marié, je m’aperçus qu’elle ne possédait qu’un vieux pot percé, deux écuelles, deux cuillères et deux vieilles vaches).

C’est à Paris que la chanson devient grivoise. Une riboull (piste) dans les bistrots de Montparnasse et notre pardon passé de Collorec à Spezet est revisité par une bande de joyeux drilles ; les paroles s’enhardissent Ur plac’h yaouank am eus kavet, e-barzh ur park hon eus kousket, ar verol vras am eus paket (J’ai trouvé une fille, nous avons dormis dans un champ et j’ai attrapé la vérole).

Le croustillant de l’histoire vient plus loin. L’organe malade fait l’objet d’une éradication radicale, il est jeté par la fenêtre Ma lost bras zo bet troc’het dre ar prenestr eo bet sklapet, ur mell ki bleiz zo tremenet ha ma lost bras en deus debret, hag ar c’hi bleiz a zo marvet (Un gros chien loup qui passait par là, l’a mangé et il est mort).

Chanson grivoise d’étudiants parisiens donc, rien de neuf sous le soleil. Sauf que grand collecteur, Yann Meur enregistre par deux fois la même chanson à Spezet par des personnes qui certifient l’avoir apprise de leur père. Du reuz (chambard) donc dans le landerneau du chant traditionnel : la paillardise est-elle une tradition ancestrale dans nos montagnes bretonnes ?
Faute de réponse, notre sonneur a concocté une version soft : D’ar paotr yaouank moa roet ur bouch, e vuzelloù a oa ken dous kalina lina pouchi poucha (J’avais donné un baiser au jeune homme, Ses lêvres étaient si douces …). Espérons que Pouchi Poucha édité par Kenleur fera autant le buzz que l’originaL

Pennad orin / Texte original

Ba’ Pardon Speied e oan bet Ur paotr yaouank am 'oa kavet, chilaou li pouchi poucha Ur paotr yaouank am 'oa kavet, Chilaou la Tener, friant oa ar C’hernead Ha dreist-holl dañser dilikat, chilaou li pouchi poucha Bet e oan bet o welet ‘neoñ Serten ken koant evel oa-eñ, chilaou li pouchi poucha Lâret 'n 'oa din e oa soner Koulskoude ne oa ket ul lonker, chilaou li pouchi poucha Ur fromadenn am 'oa tapet ‘n taol kurun karantez 'm 'oa bet, chilaou li pouchi poucha Barzh ur park bihan serten oamp bet Hag ar paotr am 'oa briataet, chilaou li pouchi poucha D’ar paotr yaouank 'm ’oa roet ur bouch E vuzelloù a oa ken dous, kalina lila pouchi poucha Ma soner galant ’n ’oa mouslâret din E c’hoant da’m gwelet disul vintin, kalina lila pouchi poucha

Troidigezh / Traduction

J’étais allée au Pardon de Spézet J’avais rencontré un jeune homme, Le Cornouaillais était tendre, sensuel Et surtout un danseur raffiné J’étais allée le trouver Tellement, je vous assure, je le trouvais mignon Il m’avait dit qu’il était sonneur Cependant ce n’était pas un ivrogne Je fus submergée par l’émotion Et puis advint le coup de foudre Nous étions allés, oui, dans un petit champ Et amoureusement j’avais étreint le garçon Au jeune homme j’avais donné un baiser Ses lèvres, comme elles étaient douces, Mon amour de sonneur m’avait susurré Son désir de me voir dimanche matin

Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin

Yann Meur, Pouchi Poucha, sur les traces de Pardon Speied, Kenleur, 2022, 64p.

Wikipédia fr, Suite sudarmoricaine,
Wikipedia En, Suite Sudarmoricaine,

Media

Poher Hebdo : Maël Daniel, Pardon Speied revisité, 21 Juillet 2022
France 3 Bretagne : Gilles le Morvan, Suite sudarmoricaine, France 3 Bretagne, 2015

Video

Alan Stivell, Suite Sudarmoricaine, 1973
Nolwenn Leroy, Suite sudarmoricaine, 2010
Kern, Pardon Speied, 2011
Ambre Thiémé, Pouchi Poucha, 2022,