Le Trésor du breton écrit Teñzor ar brezhoneg skrivet
Ce blog s'inscrit en complément de la Chronique Brezhoneg : trésor du breton écrit publiée dans Ouest-France dimanche. Vous y trouverez les textes intégrals et leurs traductions ainsi que des éléments de bibliographie et des liens internet pour en savoir plus. Amzer ar brezhoneg skrivet a ya eus ar bloaz 800 betek vremañ. Kavout a reoc'h amañ ar pennadoù en o hed hag o zroidigezh ha war an dro un tamm levrlennadurezh hag al liammoù internet da vont pelloc'h ganti ma peus c'hoant.

2022 : C’hwezh ar vro ( Les odeurs de ma Bretagne), ou comment sent-on le monde à la manière de Bretagne

Dans son dernier livre, Roger Faligot ouvre avec beaucoup de pertinence le grand livre des odeurs particulières en Bretagne. Les références à la langue bretonne sont omniprésentes avec un chapître particulier sur la singularité celtique de ces odeurs qu’on entend c’hwezh a glevan. Il part pour cela d’une célèbre strophe de l’anthologie des chants bretons du XIXème siècle, le Barzaz Breizh tiré du chant Skolvan que Gallois et Bretons partagent : C’hwezh an tin hag al lore a glevan, C’hwezh karno rostet a glevan ( J’entends l’odeur du thym et du laurier, J’entends l’odeur de sabots brûlés). Car dans toutes les langues celtiques on entend les odeurs !

Autre mot celtique blaz qui est utilisé pour le goût et pour l’odeur : blaz ar c’hozh zo en ti (il y a une odeur de vieux dans la maison). Blaz peñver, signifie odeur fade, blaz ar gwin, odeur de vin. Ceux qu’on désigne par blaser flaerius sont des puants de première. Roger Faligot fait remarquer à juste titre que blazañ en breton, blasa en cornique, blasu en gallois, blais en gaélique sont identiques. 

Autre mot très celtique bramm (pêt) qui s’écrit bram en gallois et broim en irlandais. Un célèbre dicton affirme avec force An hini a zant ar c’hwezh, diouzh e revr e kouezh ( Celui qui perçoit le premier l’odeur c’est de son derrière que cela vient). L’auteur cite aussi ce qu’il appelle “une belle tournure” : e blegadenn vintin ‘n doa graet a-dreñv an ti, c’hwezh ar c’haoc’h jistr a oa en aer (Dans la pliure du matin faite derrière la maison on sentait l’odeur de la merde de cidre).

Le mot c’hwezh n’est pas seulement péjoratif : c’hwezh fall (mauvaise odeur) alterne avec c’hwezh vat (parfum). On ne compte plus les expressions imagées avec ce mot : c’hwezh an touf, indique le moisi, c’hwezh ar rost zo gantañ designe quelqu’un qui sent le rôti. En langage imagé on trouvera un c’hwezh an da zont zo ganti littéralement l’odeur de l’avenir est avec elle, pour designer un cadre à haut potentiel. Un producteur de “fake news” se verra traiter de c’hwezh ar gaou zo gantañ ( ça sent le mensonge) et enfin quelqu’un qui disparait du tohu-bohu médiatique on dira de lui : na vez c’hwezh ebet ken eus outañ ( il n’y a plus d’odeur de lui). Terminons par ce dynamique  c’hwezh ar vuhez, (souffle de la vie) qui irrigue cette jolie promenade dans ce monde plein d’odeurs qui est le nôtre.

Pennad orin / Texte original

Troidigezh / Traduction

Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin

Roger Faligot, Les odeurs de ma Bretagne, Géorama, 243p, 2022.

Erwan Hupel, Ur c'hwezh e oa, in Al Liamm, N°450, genver-c'hwevrer 2022, p.42
Emile Ernault, Glossaire cryptologique du breton, 1884, Bramm pp 291-293. (lenn war Gallica)
Martial Ménard, Devri, dictionnaire diachronique du breton en ligne, C'hwezh, Bramm, Blaz