Le Trésor du breton écrit Teñzor ar brezhoneg skrivet
Ce blog s'inscrit en complément de la Chronique Brezhoneg : trésor du breton écrit publiée dans Ouest-France dimanche. Vous y trouverez les textes intégrals et leurs traductions ainsi que des éléments de bibliographie et des liens internet pour en savoir plus. Amzer ar brezhoneg skrivet a ya eus ar bloaz 800 betek vremañ. Kavout a reoc'h amañ ar pennadoù en o hed hag o zroidigezh ha war an dro un tamm levrlennadurezh hag al liammoù internet da vont pelloc'h ganti ma peus c'hoant.

1942 : les débuts du breton à l’école publique : les conseils pédagogiques d’Annig Sohier (Kentelioù kelenn A. Sohier)

C’est par la petite fenêtre que le breton est entré à l’école publique pendant la guerre : une heure par semaine ! Pour les instituteurs volontaires c’est un défi : tout est à faire en matière pédagogique. Annick Sohier, fidèle à l’engagement de son mari Yann Sohier, décédé sept ans auparavant, relève le défi dans le bulletin de liaison des instituteurs An Eost (la moisson). 

Elle détaille ce qu’elle appelle an doare dielfennañ (La méthode synthétique ou syllabique)) : An doare-mañ a ya eus an elfenn d’ar ger ha d’ar frazenn (cette méthode part d’un élément pour aller au mot puis à la phrase). Concrètement c’est klevet, klask, skrivañ, tresañ, sevel gerioù, sevel frazennoù, kontañ (entendre, chercher, dessiner, écrire, faire des mots, des phrases les formuler).

La deuxième façon d’enseigner est la méthode analytique ou globale, théorisée par Ovide Decrolly : An doare strollek a zo kontrol d’an doare dielfennañ : mont eus ar frazenn a-bezh, d’ar ger ha d’al lizherenn. Deskadurezh al lennerezh n’eo ket mui un dra ijinet hogen un dra bev, stag ouzh ar yezh. ( C’est le contraire de la méthode synthétique. La methode Decrolly part de la phrase entière vers le mot puis la lettre. Apprendre à lire est quelque chose de concret, de vivant au plus près du langage).

Annick Sohier insiste sur le lien charnel entre l’enfant et sa langue : Deomp-ni skolaerien d’o lakaat da verzout ar sklaerder, ar c’hensonerezh, ijin yezh o c’havell. Deomp-ni da lakaat enno evito estlamm ha karantez ( C’est à nous instituteurs de leur faire remarquer la clarté, la sonorité, le génie de leur langue maternelle. On doit leur transmettre l’admiration et l’amour de leur langue).

L’apprentissage de la lecture et de l’écriture de la langue parlée ne sont qu’une étape : pal an deskadurezh eo kas ar bugel betek ar yezh skrivet, pinvidikoc’h eget e hini (Le but de l’instruction est d’amener l’enfant vers la langue écrite plus riche que la sienne). Et pour celà elle prône d’utiliser toutes les recettes d’une pédagogie active : kanaouennoù, kontadennoù, barzhonegoù, sonerezh, koroll, tresadur, dezrevelladur ( les chants, les contes, la poésie, la musique, la danse, le dessin, l’art de raconter). Et Annick Sohier de conclure : Ul levenez vras hor bezo erfin da vezañ treuskaset en he c’haerder, d’ar vugale, o yezh vammel ( Nous serons très heureux d’avoir fait prendre conscience aux enfants de la beauté de leur langue maternelle).

J’aurai bien aimé l’avoir comme institutrice !

Pennad orin / Texte original

Ar bugel a sevena hag a genaoz

A-nebeudoù e tihun hag e pinvidika santerezh ar bugel. Hag hep dale e teuio dezhañ c'hoant da zisplegañ e vuhezig en e c'hoarioù.

Neuize e skoazellimp anezhañ da zisplegañ e venozioù. Danevelloù ha barzhonegoù a vezo evitañ danvez pinvidik.

Ar bugel a seveno gant an treserezh pe gant ar sonerezh, ar c'horoll, pe c'hoazh en ur aozañ pennadoù dre gomz ha goude dre skrid.

Desket hon eus an doare-komz d'hon diskibien : bremañ hor bezo ar blijadur da anavezout dre o c'homzoù o-unan o zemz-spered.

Ul levenez vras hor bezo erfin da vezañ treuskaset en he c'haerder, d'ar vugale, o yezh vammel.

Annig Sohier
Renerez skol-vugaligoù

An Eost, 1 a viz Gouere 1943

Troidigezh / Traduction

L'enfant crée et s'exprime

Petit à petit s'éveille et se renforce les sensations de l'enfant. Sans tarder lui viendra l'envie de raconter sa vie de tous les jours dans ses jeux.

Alors nous l'aiderons à exprimer ses idées. Des histoires et des poésies seront plus lui une matière riche.

L'enfant créera par le dessin, par la musique, la danse ou encore par l'expression orale ou écrite.

On leur a appris la façon de s'exprimer : maintenant nous aurons le plaisir de connaitre par leur expression propre leur caractère.

Pour finir, ce sera une grande joie de leur avoir transmis la beauté de leur langue maternelle

Annig Sohier, Directrice d'école maternelle

An Eost 1 juillet 1943. p.7.

Gouzout Muioc’h / Pour aller plus loin

An Eost, bulletin de liaison des instituteurs publics de Bretagne, Décembre 1942-Mai 1944) lire en ligne sur le site I.D.B.E.